
La rascasse qui vole
Description d’un poisson envahissant, la rascasse volante, qui s’installe dans les Antilles et en Méditerranée.
Des ailes épineuses
Dans le monde sous-marin du piquant se trouve un magnifique poisson qui sème la terreur dans les eaux tropicales : la rascasse volante (ou poisson lion selon l’envie). Au passage, il ne faut pas parler de « la » rascasse volante mais plutôt « des » rascasses volantes. En effet, au moins trois espèces, que nous pouvons distinguer par leur nom scientifique, sévissent dans les eaux tropicales françaises : Pterois volitans, Pterois miles et Pterois radiata.

Leur nom de « rascasse volante » provient de leurs longues nageoires dorsales et pectorales radiées qui ressemblent à des ailes, ainsi qu’à leur nage lente, voire planante, à proximité du fond. Ces appendices gracieux ne sont cependant pas là par simple caprice esthétique. Ces nageoires sont constituées d’épines, chacune disposant de sa glande de venin à sa base. Pas touche donc si vous croisez la gracieuse bestiole sous l’eau !
Des vagabondes indésirables
A la base, nos belles rascasses croisent dans les eaux tropicales de l’Indo-Pacifique et de la Mer Rouge. Seulement, deux événements relativement récents vont venir bouleverser leur aire de répartition.

Le premier est l’ouverture du nord de la Mer Rouge avec le creusement du canal de Suez. Cela donne l’opportunité à de nombreuses espèces marines de s’expatrier en Méditerranée. Ces espèces sont qualifiées de « lessepsiennes » d’après le nom de l’architecte du canal : Ferdinand de Lesseps. Dans le tas, il y a la rascasse volante. Elle s’implante de plus en plus dans la partie orientale de la Méditerranée. Il y a même eu des observations dans l’Adriatique et sur la Côte d’Azur.
Le second événement se déroule dans les Antilles en août 1992 avec plusieurs individus de P. volitans et P. miles qui se retrouvent dans la nature suite à l’endommagement d’un aquarium de Floride lors de l’ouragan Andrew. Au fil des années, la répartition de l’espèce se développe vers le sud des Antilles. Les premières observations sont ainsi faites en 2011 en Martinique et en Guadeloupe.

En arrivant dans une nouvelle aire géographique, la rascasse volante peut devenir une espèce encombrante capable de remanier une partie des écosystèmes côtiers. D’une part, elle consomme de grandes quantités de poissons, dont les juvéniles de certaines espèces indigènes. D’autre part, la rascasse volante a peu de prédateurs (principalement certaines murènes et les poissons flûte). En résulte un casse tête de gestion localement pour préserver les écosystèmes coralliens des Antilles déjà mis à mal par le changement climatique et les activités humaines.
